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Combattre la pauvreté, pas les pauvres!

«Plus on organise de secours publics pour prendre soin des pauvres, moins ils prennent soin d’eux-mêmes, et, naturellement, plus ils deviennent misérables. Au contraire, moins on en fait pour eux, plus ils en font pour eux-mêmes, et mieux ils se tirent d’affaire.» Ainsi s’exprimait Benjamin Franklin à la fin du 18e siècle, à l’époque où le triomphe du capitalisme imposait sa brutalité et un nombre croissant de personnes ne trouvait pas de travail. Ce type de propos, particulièrement en vogue dans les milieux bourgeois justifiait la remise en cause des différentes formes de secours publics et d’aides aux indigents qui existaient à l’époque. Aujourd’hui, ce même discours sur la responsabilité individuelle revient en force, notamment dans les rangs de l’UDC, pour justifier la remise en cause des différentes formes de prestations sociales aux plus démunis: Moins on leur donne, plus ils se débrouilleront.

Le retour de la pauvreté

Alors que le phénomène de la pauvreté semblait dans une large mesure éradiqué dans les pays industrialisés avancés au cours de la phase de croissance des «trente glorieuses», la question de la pauvreté a refait surface, au cours des vingt dernières années dans le sillage de la crise structurelle de l’économie mondiale qui s’amorce à partir des années 1970. Sous l’effet de la progression du chômage, du retour des politiques libérales et de la remise en cause des politiques sociales, la question de la «nouvelle pauvreté» est à nouveau posée de manière forte. De leur côté, les statistiques sur les «working poors», sur le nombre de personnes recourant à l’aide sociale ou sur les personnes bénéficiant de certaines assurances sociales (AVS, AI, et prestations complémentaires) viennent rappeler l’ampleur du phénomène. En Suisse, presqu’une personne sur dix entre 20 et 59 ans est considérée comme pauvre selon l’Office fédéral de la statistique tandis qu’environ 250’000 personnes ont dû se tourner vers l’aide sociale. Alors que les revenus des plus riches n’ont cessé de progresser, conduisant à des inégalités sociales croissantes; dans un des pays les plus riches du monde, la pauvreté est d’une actualité révoltante. Comment admettre que plusieurs dizaines de milliers d’enfants vivent aujourd’hui dans des familles pauvres dépendantes de l’aide sociale? Comment ne pas trouver scandaleux le fait que le divorce et les séparations équivalent pour de nombreuses femmes avec des charges familiales à l’inévitable recours à l’aide sociale? Comment admettre que la droite, l’UDC en particulier, instrumentalise la pauvreté pour mieux servir les intérêts économiques de ses dirigeants?

Pas de pitié pour les pauvres!

Face à cette nouvelle réalité de la pauvreté, les propositions des milieux patronaux et de la droite ne font en effet qu’exiger une plus grande responsabilité individuelle, des «mesures actives» contraignantes pour les bénéficiaires d’aide sociale et réclamer une lutte accrue contre les abus. Cela s’est traduit par un durcissement de la législation envers les bénéficiaires d’aides sociales. S’il faut, bien entendu, prévenir et sanctionner les abus, le principal enjeu n’est pas là. L’existence de la pauvreté renvoie à un système économique producteur d’inégalités et pour lequel l’existence de salariés précarisés et pauvres n’est pas un problème, mais une nécessité. A défaut, les revendications de hausse de salaires se feraient plus fortes et menaceraient les intérêts de ceux qui font de l’accumulation inconsidérée de richesses par le plus petit nombre leur cheval de bataille. Face à ce constat, deux solutions à court terme. Premièrement, il s’agit d’améliorer sensiblement les politiques d’intégration et de reconversion professionnelles en Suisse à l’instar de pays comme le Danemark. En second lieu, il convient de renforcer les efforts en faveur de la garantie d’un minimum social incompressible pour l’ensemble des salarié-e-s de ce pays. La pauvreté et le chômage ne sont jamais une fatalité.

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