La droite s’attaque à l’AVS sur le dos des femmes

La rédaction •

Ce dimanche 25 septembre 2022, le peuple suisse a refusé de supprimer l’impôt anticipé sur les obligations et accepté d’une très courte majorité AVS 21. Analyse d’un dimanche référendaire qui, à 32’000 voix près, aurait pu signer une très grande victoire pour la gauche. À la place, nous avons vécu une défaite rageante qui est une insulte aux millions de femmes du pays, et plus particulièrement aux milliers d’entre elles qui se sont mobilisées depuis des mois contre le projet inique de la droite.


Une nouvelle contre-réforme fiscale de refusée

La défaite sur AVS 21 escamote un peu la grande victoire de ce dimanche sur le front fiscal. Après le relèvement des déductions fiscales pour enfants (refusé le 27 septembre 2020 avec 63,2% de non), puis la loi sur les droits de timbre (rejetée le 13 février 2022 à 62,6%), c’est désormais au tour de la loi sur l’impôt anticipé d’être défaite par référendum par la gauche et les syndicats. Si ce dernier veto populaire est toutefois moins clair (52,0%) que les précédents, il est tout de même absolument délicieux de relever que le bloc bourgeois se casse les dents sur une thématique fiscale, pour la troisième fois d’affilée.

Quand les hérauts (et justement pas les héros) du camp patronal dénonceront ces prochaines semaines à cor et à cri un système fiscal irréformable, il conviendra alors de souligner en guise de réponse l’entêtement stupide de la droite à vouloir démanteler l’État fédéral — sans pour autant disposer de majorité sociale pour le faire. À celles et ceux qui pousseront des cris d’orfraie accusant la gauche de bloquer le pays, un cours d’initiation aux principes élémentaires d’un régime parlementaire pourra leur être proposé. En tant que force d’opposition (systématiquement méprisée par la droite sur les questions fiscales), la gauche est dans son bon droit lorsqu’elle tente de couler par tous les moyens les réformes promulguées contre son gré par ses adversaires politiques.

Le bloc bourgeois est désormais par trois fois prévenu, la gauche l’attend de pied ferme quand il est question d’impôts et sait manier l’arme du référendum facultatif.

AVS 21: une défaite rageante

Si le relèvement de la TVA pour un financement additionnel de l’AVS a été largement adopté (avec 55,1% de oui et 18 cantons), la nouvelle loi sur l’AVS n’a, elle, été acceptée que d’un cheveu (50,6%, soit 32’000 voix de différence). Si toute défaite référendaire est dure à avaler lorsque le résultat est aussi serré, il faut néanmoins rappeler que réunir 49,4% des voix lorsqu’on ne détient qu’un tiers des sièges à l’Assemblée fédérale est en soi une performance. Une mobilisation un peu plus intense (notamment dans les grandes villes alémaniques), et le paquet était refusé.

Après les mobilisations féministes de ces dernières années, ce résultat est un véritable affront à toutes les femmes qui se battent pour l’égalité. Elle a fait ressortir le vieux fond misogyne de la droite, et son absence totale de scrupule à faire payer les personnes les plus défavorisées lorsqu’elle veut faire des économies sur le dos de la population. La mobilisation pour le 14 juin 2023 qui se prépare n’en devient que plus urgente.

Si la bourgeoisie suisse a finalement réussi à faire avaler au peuple suisse la pilule de l’augmentation de l’âge de la retraite, la réforme en question — comme cela a été rappelé durant la campagne — ne règle en aucun cas les principaux problèmes touchant les femmes et le système de retraite helvétiques en poursuivant patiemment son démantèlement. Le différentiel salarial entre femmes et hommes ne sera pas résorbé, les rentes de l’AVS ne seront pas augmentées et les caisses de pension LPP coûtent toujours trop cher…

La future réforme de la prévoyance professionnelle (LPP21), qui pour le moment est tout aussi antisociale qu’AVS 21, constituera selon toute vraisemblance le prochain grand combat des partis de gauche et des syndicats. La préparation de la campagne commence maintenant, mais le résultat extrêmement serré de ce dimanche place la gauche en position de force.

Peu de bonnes surprises cantonales

Comme il est d’habitude en Suisse, des votations cantonales se tenaient en parallèle des enjeux fédéraux. Dans ces scrutins, les projets les plus intéressants n’ont malheureusement pas passé: Berne a refusé à 67,2% le droit de vote à 16 ans (pourtant soutenu par une majorité du Grand Conseil), tandis que Neuchâtel a rejeté à 63,2% l’instauration d’une assurance dentaire (le Grand Conseil a toutefois adopté un très timide contre-projet indirect). La seule lumière cantonale nous vient, une fois n’est pas coutume, du canton de Lucerne qui a sèchement balayé à 71,5% une contribution de 400’000 frs à la rénovation de la caserne de la garde pontificale suisse.

Crédit image:  Arnaud Jaegers sur Unsplash.

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