Conférence-débat avec Firas Kontar, jeudi 16 janvier 2025 à 20h00, Maison du Peuple de Lausanne •
Firas Kontar est juriste et politologue, opposant syrien à la dictature, auteur de Syrie, la révolution impossible (Aldeïa, 2023). Cet événement est organisé par le Cercle de débats Rosa Luxemburg, en collaboration avec les Femmes syriennes pour la démocratie. Il est soutenu par Pages de gauche.
En quelques jours, début décembre, le régime Assad s’est effondré en Syrie. À la surprise de tout le monde, alors qu’États européens et arabes normalisaient leurs relations avec un régime mafieux et l’un des plus brutaux du 21e siècle, le dictateur est piteusement parti s’abriter auprès de son protecteur, Vladimir Poutine.
Cette fuite marque la fin de 54 ans de dictature et de 13 ans d’une guerre d’une violence inouïe contre une population qui s’est soulevée pacifiquement, en 2011, contre le régime.
Le pays a vu la moitié de sa population être contrainte de se réfugier à l’intérieur ou à l’extérieur, cible des bombardements du régime et de ses auxiliaires, des dizaines de milliers de personnes emprisonnées et torturées à une échelle industrielle – la prison de Saidnaya étant le symbole sordide de cette réalité – nombre d’entre eux tués. Depuis des années, l’ONU ne décompte plus le nombre de victimes en Syrie, qui dépasse largement le demi-million, 90% d’entre elles tuées par le régime.
La Syrie, pays brûlé : «Assad ou le néant» était le mot d’ordre. La dictature a joué la carte de l’extrémisme confessionnel pour se maintenir au pouvoir, favorisant de fait la naissance du mutant «État islamique». Pourtant, la capacité de la population à s’opposer encore et toujours au régime est visible ces derniers jours. Sans Assad, ce n’est pas le néant mais l’ouverture d’un espace des possibles dans lequel l’esprit des soulèvements populaires de 2011 peut trouver un nouveau souffle, dans des conditions différentes.
La localisation de la Syrie, dans une région hautement stratégique, a prolongé et brutalisé la guerre: implication de l’Iran, du Hezbollah et de la Russie sauvant à différentes reprises le régime, coalition internationale contre l’État islamique, jeu de la Turquie voulant entraver les aspirations à l’autodétermination du peuple kurde, etc. Cette donne influe sur la situation post-dictature: le gouvernement israélien a immédiatement occupé le Golan et bombardé le territoire syrien. Certains colons israéliens lorgnent déjà vers les territoires syriens… Le gouvernement turc accélère sa guerre contre les populations kurdes en attaquant le nord et le nord-est de la Syrie.
Les partis d’extrême droite en Europe réclament le retour immédiat des réfugié·e·s, ce qui est impossible et inhumain car le pays est détruit.
Depuis la chute d’Assad, des millions de Syrien·ne·s descendent dans les rues, fêtant la libération des prisonnières·ers, pleurant les mort·e·s et les disparu·e·s, célébrant la dignité retrouvée. Des Syrien·ne·s exilé·e·s à l’intérieur ou à l’extérieur du pays reviennent pour retrouver leurs proches.
Dans la période de transition qui s’ouvre, c’est l’avenir de la Syrie qui se joue. L’équation comporte de nombreuses inconnues, espoirs et craintes se mêlent. Comment construire une Syrie démocratique, intégrant toutes les composantes de la société? Quels sont les acteurs de ce changement? Quelles vont être les conséquences de l’enchevêtrement des intérêts des différents États, dans une région en flammes?
Après des décennies de confiscation du pouvoir par le clan Assad, il est temps d’écouter ce que les Syrien·ne·s ont à dire, comment ils et elles envisagent les changements nécessaires.
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