Après la victoire du parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) aux élections générales, Zapatero apparaît de plus en plus comme un modèle pour la gauche européenne. Que faut-il en penser?
Le site d'information Rue89 a fait un très bon papier sur cette question .
J'en ai extrait l'intervention de Philippe Marlière (qui est aussi rédacteur à Démocratie et Socialisme ) qui me semble particulièrement intéressante:
"Libéral jusqu'au bout des ongles"
"Sans faire de bruit, José Luis Rodríguez Zapatero est devenu un leader crédible de la social-démocratie européenne. Sur un plan personnel, Zapatero est l’anti-Blair ou l’anti-Royal : il est effacé, simple, modeste. Cette "authenticité" qu’il cultive à l’envi lui vaut la sympathie de la plupart des Espagnols. A l’inverse de ses deux collègues, Zapatero n’est pas un personnage autoritaire. Il a certes su placer des hommes liges aux postes-clés du PSOE, mais sans heurter les militants comme ont pu le faire Tony Blair ou Ségolène Royal. Zapatero est celui qui incarne le mieux aujourd’hui la "Nouvelle social-démocratie": un courant pragmatique, centriste et résolument libéral. Sur le plan économique, le premier ministre espagnol ne se distingue guère des autres partis de centre-gauche au pouvoir. Son action s’inscrit dans le cours d’une politique modestement redistributrice, reposant sur un "Etat allégé" et faisant la part belle à l’initiative privée. A l’instar du blairisme, les résultats macroéconomiques apparaissent bons, mais sont assez trompeurs: 2,88 millions d’emplois ont été créés et le produit intérieur brut a progressé pendant quatre ans d’environ 3,5% chaque année. Le revers de la médaille de ce néolibéralisme de gauche a été l’aggravation de la précarité et l’augmentation du nombre de travailleurs pauvres. Sur ce plan, le zapatérisme ne se démarque pas nettement du blairisme, même si l’Espagnol ne se hasarderait pas, comme l’a fait le Britannique, à vanter la supériorité tout terrain du secteur privé sur le public ou encore à tresser des lauriers aux entrepreneurs, aux stars du show biz ou aux joueurs de football…
José Luis Rodríguez Zapatero est aussi un vrai libéral sur le plan politique et culturel: légalisation du mariage homosexuel, lois accélérant la procédure de divorce, facilitant l’avortement et pénalisant davantage la violence contre les femmes. Avec le très timide Pacs, le PS est en retard sur le PSOE en ce qui concerne l’égalité entre les sexes. Ni Jospin, ni Royal, très conservateurs sur ces questions, n’auraient fait ce que Zapatero a achevé sur ce terrain. L’"Espagne catholique" est aujourd’hui un pays plus pluraliste et plus tolérant que la France laïque.
Zapatero est un des rares leaders politiques qui a tenu ses promesses: retrait des troupes en Irak et, comble du courage pour un social-démocrate nouvelle manière, il a régularisé plusieurs centaines de milliers de travailleurs étrangers clandestins!
Zapatero ne peut être un modèle pour une gauche française de gauche car sa politique sociale et économique ne rompt pas avec le consensus néolibéral de la social-démocratie européenne. Néanmoins, son action concrète pour l’égalité entre les sexes devrait faire rougir de honte les conservateurs du PS en France! "