Initiatives : quel contrôle du calendrier ?

Antoine Chollet •

La défense des outils de démocratie directe qui existent en Suisse doit s’accompagner d’une conscience lucide de leurs défauts et des amendements à y effectuer.

Parmi les améliorations à apporter au fonctionnement des initiatives populaires — au niveau fédéral comme cantonal — figure la maîtrise du calendrier des votes. On aurait tort de négliger l’importance politique de celle-ci, car la date d’un vote ou sa combinaison avec d’autres votes peut parfois décider de son issue. Il ne s’agit donc pas d’une question technique. Les exemples abondent dans l’histoire, mais nous en avons encore eu une illustration cette année avec la décision du Conseil fédéral de repousser le vote de l’initiative du PS sur la limitation des primes d’assurance-maladie à 10% du revenu, afin de l’éloigner des annonces de hausse desdites primes. Il a argué d’une possible surcharge de la personne qui succédera à Alain Berset au Département de l’Intérieur, mais ses arguments controuvés n’ont pas réussi à dissimuler une manœuvre politique assez grossière.

On s’aperçoit donc que la date du vote fait partie d’une initiative, de la même manière que son contenu ou sa mise en œuvre. Afin d’éviter des mouvements opportunistes de dernière minute, qui pourraient également provenir de comités d’initiative (accélérer la mise au vote pour profiter d’un fait divers, par exemple), la solution la plus simple et la plus prévisible serait de faire dépendre la date du vote de celle du dépôt des signatures à la Chancellerie fédérale. On pourrait convenir qu’un texte doit être soumis au peuple et aux cantons dans un délai précis après ce dépôt (en suivant le calendrier des dimanches de votation établi 25 ans à l’avance), ce qui permettrait aux comités d’initiative d’anticiper cette date, de se coordonner entre eux pour éviter que certains textes soient soumis le même jour ou au contraire faire en sorte que ce soit le cas, et imposerait au parlement et au Conseil fédéral un calendrier un peu plus strict pour traiter des initiatives (lesquelles, en cas de retard dans leur examen, seraient soumises au vote sans préavis ; c’est d’ailleurs ainsi que fonctionnent les outils de démocratie directe dans les États américains).

À défaut, le Conseil fédéral conservera le droit exorbitant d’organiser les votes populaires à sa convenance.

Article paru dans Pages de gauche no 190.

Crédit image: Arnaud Jaegers sur Unsplash.

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