0

Fiscalité et redistribution des richesses

Il n’est guère de sujet qui soit aussi rébarbatif et technique que la fiscalité. Pourtant, elle représente un enjeu politique majeur. Derrière les chiffres et son caractère technique, la fiscalité constitue le principal instrument de redistribution des richesses dans le cadre d’une économie de marché capitaliste.

Au cours des derniers mois, les débats autour des réformes fiscales ont rarement autant suscité l’attention des médias. Les sujets ne manquent pas: tensions avec l’Union européenne à propos de la fiscalité des holding domiciliées en Suisse, proposition des radicaux de supprimer l’impôt fédéral direct, réforme de la TVA, de l’imposition des entreprises, dumping fiscal de certains petits cantons pour attirer de gros contribuables, initiative socialiste pour une fiscalité plus juste. Il est aussi fort probable que la fiscalité sera un enjeu central des prochaines élections fédérales.

Tous ces débats ont lieu alors que les bénéfices des plus grandes entreprises explosent (nouveau record de bénéfices en 2006 pour les entreprises cotées en bourse, avec 80 milliards de francs), que la fortune des personnes physiques les plus aisées n’a cessé de croître au cours des quinze dernières années, que la concurrence fiscale, aussi bien au niveau international que sur le plan intercantonal, fait rage et ne profite qu’aux plus riches au détriment des moins aisés.

Les cadeaux fiscaux de la droite

Dans ce contexte déjà très favorable aux plus riches de la société, la politique de la droite ne fait qu’accentuer les très fortes disparités de revenus déjà existantes: proposition de Hans-Rudolf Merz d’un taux unique de la TVA (qui renchérira les biens de première nécessité), réforme de la fiscalité des entreprises débattues au Parlement, qui ne visent qu’à alléger la fiscalité des actionnaires, ou encore la récente proposition des radicaux de supprimer l’impôt fédéral direct, qui ne profiterait qu’à 5% des contribuables les plus riches.

Deux axes principaux caractérisent les propositions de la droite: une politique délibérée des «caisses vides» et la baisse de la fiscalité directe combinée à une augmentation de la fiscalité indirecte.

Contrairement à une idée reçue largement répandue, le rétablissement des finances publiques est le cadet des soucis de la droite. Car maintenir les collectivités publiques dans les chiffres rouges permet de mieux remettre en cause les dépenses publiques, en particulier en matière sociale. A peine les comptes des collectivités publiques sont-ils équilibrés, que la droite demande des baisses des impôts.

Faire baisser la fiscalité directe et augmenter la fiscalité indirecte, qui touche indifféremment tous les contribuables, représente une autre constante de la droite, déjà mise en œuvre au cours des années 1990. Depuis le début des années 1990, la fiscalité indirecte a connu une forte progression: introduction de la TVA, majoration de taxes diverses à l’échelon fédéral, cantonal et communal, sans parler de la forte progression des primes d’assurances-maladie ou des loyers. Parallèlement, la fiscalité directe a diminué. Ainsi, les grands perdants de la politique fiscale de la droite des ces dernières années sont les bas et moyens revenus. Il n’est dès lors pas surprenant qu’une majorité de la population devienne de plus en plus allergique à toute augmentation de la fiscalité, même si celle-ci reste ciblée sur les plus hauts revenus.

Les alternatives existent

Les propositions de gauche en matière fiscale existent. Cependant, il est toujours plus facile pour la droite de brandir le slogan «Moins d’impôts, plus de libertés» pour glâner des suffrages; en revanche, proposer des solutions crédibles pour une fiscalité plus juste exige un gros travail de persuasion. Dans les médias également, les impôts ont mauvaise presse. Pourtant, l’impôt n’est pas néfaste en soi, bien au contraire. Une fiscalité solidaire permet d’assurer une meilleure justice sociale et de mettre à disposition des services publics performants. Faire passer le message d’une fiscalité plus juste nécessite un réel travail de «pédagogie politique». En tout cas, les arguments dans cette direction ne manquent pas…

 

 

 

webmaster@pagesdegauche.ch

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *