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Cet ailleurs, derrière lequel les marques cachent leur dumping social

Derrière le développement de l’économie chinoise se cachent des conditions de travail catastrophiques pour les ouvriers chinois, avec l’assentiment des multinationales des pays du Nord.

En vingt ans, la Chine est devenue l’un des principaux «ateliers du monde». Vêtements, ordinateurs, ipods ou jouets: derrière le logo des marques se cache de plus en plus souvent une réalité «made in China». Dans le domaine électronique le phénomène est particulièrement frappant. En 2005, la Chine est devenue le premier exportateur mondial de produits électroniques, pour une valeur de plus de 62 milliards de dollars. Une place acquise grâce aux investissements des multinationales étrangères, comme le souligne un récent rapport du Bureau International du travail. Ainsi, il y a dix ans, Fujitsu Siemens par exemple produisait 80% de ses ordinateurs en Allemagne. Aujourd’hui ce chiffre a été divisé par quatre et l’usine d’Augsburg (Allemagne) ne procède plus qu’à l’assemblage final de composants, fabriqués à 80% dans l’Empire du Milieu.

Le cas de Fujitsu Siemens n’est pas unique: actuellement 85% de la production de nos PC est externalisée. Et les ordinateurs vendus sous le logo de Hewlett Packard, Dell, Acer, Apple ou Fujitsu Siemens sont fabriqués par des fournisseurs – Flextronics, Hon Hai, Sanmina-SCI, Solectron ou encore Celestica – inconnus des consommateurs suisses.

Des conditions dignes de Zola

Pour les ouvriers, cette externalisation de la production signifie un risque accru de dumping social. En effet, dans les usines des fournisseurs, situées dans les zones franches des pays en développement, le non-respect des droits les plus élémentaires du travail est la norme. Jia Leung par exemple a 19 ans. Comme des milliers d’ouvrières chinoises, elle a quitté son village pour trouver un emploi dans une zone industrielle. Dans son usine, qui produit pour Fujitsu Siemens et ACER, elle travaille douze heures par jour, samedi et dimanche inclus, parfois plusieurs semaines de suite. Les heures supplémentaires sont obligatoires. En période de basse production par contre le responsable de la ligne d’assemblage la renvoie le matin, sans qu’elle ait pu exercer son activité. Au niveau du salaire, Jia gagne 3.9 yuans (60 centimes) par heure. Un revenu qui respecte le salaire minimum de la région, mais qui ne suffit pas pour vivre décemment. En matière de sécurité de l’emploi, Jia a signé un contrat lors de son engagement. Elle ne sait cependant pas si ce contrat stipule qu’elle est assurée en cas d’accident, de maladie ou de maternité: contrairement à ce qu’exige la législation nationale chinoise, la direction ne donne pas de copie du contrat de travail aux ouvriers. En matière de santé enfin, les ouvrières de l’usine n’ont reçu aucune information quant aux substances toxiques qu’elles manipulent. Pourtant, il est connu que l’inhalation de plomb, d’acide nitrique ou de bérillyum qui servent à la fabrication des ordinateurs peuvent conduire à de graves problèmes de santé.

Le cas de Jia Leung n’est pas unique: il est symptomatique des abus auxquels sont confronté-e-s les cinq millions d’ouvriers et d’ouvrières qui travaillent dans les usines électroniques chinoises, comme le révèle une enquête de terrain réalisée pour Pain pour le prochain et l’Action de Carême (voir www.fair-computer.ch).

Les limites des codes de conduite

Face à cette situation, les gandes marques d’ordinateurs affirment vouloir réagir. Elles adoptent des code de conduite, que devraient respecter leurs fournisseurs en Chine, et multiplient les déclarations de «responsabilité sociale» dans leurs rapports annuels et sur leurs sites Internet. Il est cependant des contradictions qui ne trompent pas. Dans ces codes de conduite, les références à la liberté d’association et à la liberté de négociation collective demeurent le plus souvent lacunaires. Et sur le terrain, les processus de dialogue avec les partenaires sociaux – commissions du personnel, organisations de défense des travailleurs – sont quasi inexistants. Dans ce contexte, ces codes apparaissent plus comme des opérations de relations publiques que comme une façon d’appuyer les démarches et les intérêts des travailleurs en Chine, ou ailleurs.

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