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N° 169, l’éditorial: Sous les bombes

Sous la pression des entreprises exportatrices de matériel de guerre, le Conseil fédéral souhaite autoriser les exportations d’armement dans des pays en situation de conflits internes. Cette demande d’assouplissement de l’ordonnance sera soumise aux chambres fédérales. L’hypocrisie est bien entendu totale : pour pouvoir exporter, les entreprises devront seulement prouver que les armes vendues ne seront pas utilisées dans le conflit interne.

Tous ces éléments sont alarmants et traduisent certaines évolutions dans l’attitude agressive des marchand·e·s d’armes suisses. Récemment RUAG (dont la Confédération est l’actionnaire unique) voulait construire une usine de munition au Brésil, plus près des « marchés ». Devant les protestations, la proposition a été provisoirement retirée. Aussi les marchand·e·s d’armes profitent de toutes les largesses actuelles de la loi. Pour contourner les restrictions à l’exportation, ils exportent en pièces détachées les armes,   puisque la « règle des éléments d’assemblage » permet d’exporter jusqu’à la moitié des coûts de fabrication du produit fini.

Déjà en 2014 la majorité de droite du Conseil national acceptait d’assouplir l’ordonnance fédérale sur le matériel de guerre dans le sens de supprimer l’interdiction d’exporter du matériel de guerre dans des pays qui violent « systématiquement et gravement les droits de l’homme ». Même hypocrisie qu’aujourd’hui, puisqu’il s’agissait de démontrer que les armes vendues ne servaient pas à violer lesdits « droits de l’homme ».

Le Conseil fédéral a pris toutes ces mesures en faveur des marchand·e·s d’armes après le refus de l’initiative de 2009 « pour l’interdiction d’exporter du matériel de guerre » du Groupe pour une Suisse sans Armée. En ce temps, son argument principal pour refuser cette initiative était que l’ordonnance venait d’être renforcée pour tenir davantage compte des droits fondamentaux. L’effet économique est  évident et la droite a fait ses comptes ; en 2014, la Suisse exportait pour 340 millions de francs, et pour près de 450 millions en 2017.

Toutes ces pratiques mortifères ont été mises en évidence dans un audit récent du Contrôle fédéral des finances. Il apparaît que l’organisateur principal de ce commerce, notamment à destination de l’Arabie Saoudite, des Émirats arabes unis ou encore de la Turquie, est le Seco. Cela tombe bien car cet organisme est aussi chargé d’effectuer en partie le contrôle en délivrant les autorisations.

Pour mettre fin à cette hypocrisie, il s’agit à court terme de soutenir le lancement de l’initiative dite de rectification contre les exportations d’armes vers les pays en guerre civile. À moyen terme, il s’agit aussi de continuer la lutte pour la suppression de l’armée suisse, principal moteur de l’industrie suisse de l’armement.

La rédaction

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